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Amiral Thierry d’Argenlieu

, par

L’amiral Thierry d’Argenlieu (en religion : père Louis de la Trinité O.C.D.) , né et mort à Brest (7 août 1889 - 7 septembre 1964), est un marin, prêtre religieux carme et résistant français.

Enfance, formation et début de carrière

Issu d’une famille bourgeoise picarde établie à Argenlieu, près d’Avrechy, dans l’Oise, Georges Thierry d’Argenlieu est le fils d’un contrôleur général de la Marine, Olivier Thierry d’Argenlieu.

Après des études au collège Stanislas à Paris et au lycée Saint-Charles à Saint-Brieuc, il entre à l’École navale en octobre 1906.

Enseigne de vaisseau de 1re classe en 1911, il participe à la campagne du Maroc et y reçoit la Légion d’honneur.

Première Guerre mondiale

Servant en Méditerranée pendant la Première Guerre mondiale, il demande son admission dans le Tiers-Ordre du carmel lors d’une escale à Malte, en 1915. En juillet 1917, il est promu lieutenant de vaisseau. Il démissionne après la guerre pour entrer chez les Carmes déchaux.
Religieux

À la fin de la guerre, d’Argenlieu entreprend des études de théologie au Collège Saint-Thomas, la future Université pontificale Saint-Thomas-d’Aquin, Angelicum à Rome.

Il prend l’habit de religieux carme en tant que Louis de la Trinité au couvent d’Avon en 1920 et prononce ses premiers vœux le 15 septembre 1921. Après quatre années d’études dans les facultés catholiques de Lille, il est ordonné prêtre à Lille en 1925.

La Province des Carmes de Paris ayant été restaurée le 11 février 1932, il est nommé supérieur provincial de Paris en 1935.

Seconde Guerre mondiale

En septembre 1939, il est mobilisé dans la Marine comme officier de réserve et rejoint Cherbourg. Promu capitaine de corvette le 10 février 1940, il est fait prisonnier lors de la défense de l’arsenal de Cherbourg le 19 juin, mais il s’évade trois jours plus tard et rejoint le général de Gaulle à Londres le 30. Selon de Gaulle, qui l’écrit dans ses mémoires, d’Argenlieu serait à l’origine de la proposition de la croix de Lorraine comme symbole de la France libre2. D’autres sources, dont Thierry d’Argenlieu lui-même, indiquent que le 1er juillet 1940, il participa à une entrevue avec de Gaulle au cours de laquelle le vice-amiral Muselier a proposé la Croix de Lorraine comme symbole.

Avec Félix Éboué et trois autres personnes, il est parmi les tout premiers compagnons décorés de l’ordre de la Libération, le 29 janvier 1941. Il devient le premier chancelier de cet ordre, fonction qu’il occupe de 1941 à 1958. Il y impose pratiquement ses choix et en particulier n’y admet les femmes qu’au compte goutte[réf. nécessaire] : sur plus de mille membres, six sont des femmes dont quatre sont admises à titre posthume.

Nommé chef d’état-major des Forces navales françaises libres en juillet 1940, il participe à l’expédition de Dakar, dirigeant la délégation de parlementaires envoyés auprès des autorités vichystes le 23 septembre. En novembre, il dirige les opérations navales lors de la campagne du Gabon.

Il devient en 1941, membre du Conseil de défense de l’Empire puis du Comité national français. Après une mission politique au Canada en mars 1941, il est nommé Haut-commissaire de France pour le Pacifique avec les pleins pouvoirs civils et militaires en juillet. À ce titre, il préside au ralliement de Wallis-et-Futuna en mai 1942. Au cours de son séjour en Nouvelle-Calédonie, son autoritarisme cassant lui vaut l’animosité de la population, aggravée par ses divergences de vue avec le gouverneur Henri Sautot, si bien que des troubles graves secouent Nouméa où son autorité est malmenée ; la menace d’une attaque japonaise ramène les protagonistes à la raison.

Revenu à Londres en 1943, il est nommé chef des Forces navales françaises libres en Grande-Bretagne le 19 juillet. Il est nommé vice-amiral en décembre 1944.

Le début de la guerre d’Indochine

Le 16 août 1945, le général de Gaulle le nomme Haut-commissaire de France et commandant en chef pour l’Indochine avec pour mission de rétablir l’ordre et la souveraineté française dans les territoires de l’Union indochinoise ; et, une fois l’Indochine libérée de l’occupation japonaise et chinoise et les provinces laotiennes et cambodgiennes annexées par le Siam récupérées, de mettre en place une fédération des peuples de la péninsule.

Le 6 septembre 1945, l’amiral d’Argenlieu part pour Saïgon et y arrive le 31 octobre ; il y retrouve le général Leclerc, présent depuis le 5 octobre. Les deux hommes ne s’entendent guère et leur conflit conduit au départ de Leclerc en juin 1946. Ils n’ont pas la même position sur l’opportunité et la nature des négociations avec Hô Chi Minh.

Au nord du Viêt Nam, s’est constitué un gouvernement provisoire, présidé par Hô Chi Minh et qui a entamé des discussions sérieuses avec un représentant français, Jean Sainteny. Le 6 mars 1946, un accord (accords Hô-Sainteny) est signé par lequel « la France reconnaît la République du Viêt Nam comme un État libre ayant son gouvernement, son Parlement, son armée et ses finances », accord qui fut qualifié en privé par d’Argenlieu de « Munich indochinois ». Le 18 mars, Leclerc arrive à Hanoï avec des éléments de sa 2e DB, accueilli triomphalement par les Français mais défilant dans les rues vides du quartier annamite. Le commentaire précise : « La foule est clairsemée et les Indochinois sont absents ».

D’Argenlieu n’accepte pas vraiment les accords Hô-Sainteny du 6 mars 1946. Ses entretiens avec Hô Chi Minh, le 24 mars 1946, à bord de l’Émile Bertin, en Baie d’Ha-Long, en présence de Jean Sainteny et Pignon, ne rapprochent pas les points de vue et sont l’occasion d’un incident violent avec Leclerc. L’amiral d’Argenlieu convoque Raoul Salan et, tremblant de colère, lui demande de « rappeler Leclerc à la raison ». En opposition aux accords du 6 mars 1946, il proclame une République de Cochinchine le 1er juin 1946, alors qu’Hô Chi Minh est parti en France accompagné par Raoul Salan.

Il est promu vice-amiral d’escadre en mars 1946 et amiral trois mois plus tard.

C’est alors qu’intervient le bombardement d’Haiphong. Un témoin, le militant communiste Henri Martin, alors jeune marin combattant FFI engagé volontaire pour combattre les Japonais, commente : « C’est là que commence la guerre, par la volonté de d’Argenlieu de passer à la reconquête, de s’emparer de ce port, essentiel dans l’activité économique, comme le montrent les cartes du temps du colonialisme. L’accord du 6 mars parlait bien de finances indépendantes, mais, précisément, les ressources essentielles du gouvernement vietnamien se trouvaient dans ce port et les troupes françaises prétendaient continuer à en contrôler l’activité commerciale ».

C’est à propos d’un contrôle douanier qu’eut lieu le premier accrochage le 19 novembre 1946.

Des coups de feu furent échangés entre deux patrouilles, une française et une vietnamienne, puis dans la ville pour se transformer en bataille généralisée. La fusillade dégénère et fait 24 morts. Parmi eux le commandant Carmoin qui s’avançait avec un drapeau blanc vers les Vietnamiens de la jonque.

L’incident de la jonque chinoise est aussitôt exploité par les partisans d’une reconquête de l’ancienne colonie. Leur chef de file est l’amiral d’Argenlieu. Un cessez-le-feu intervint assorti d’un ultimatum français, exigeant l’évacuation de la ville par les troupes vietnamiennes.

Henri Martin raconte : « À 10 heures le 23 novembre 1946, les bâtiments de la marine nationale ouvrent le feu. Le croiseur Émile Bertin depuis l’embouchure de la rivière Rouge mais nous, avec Le Chevreuil, nous étions sur la rivière, dans la ville. Nous avons épuisé notre stock de cinq cents obus, et ravitaillés, nous en avons encore tiré cinq cents. L’amiral Battet a estimé le nombre des victimes en ville à six mille, mais il est possible qu’il y en ait eu davantage quand on sait que le bombardement a porté surtout sur le quartier annamite, aux maisons serrées [...] ».

L’objectif militaire est provisoirement atteint, mais les tentatives de bâtir des structures nouvelles se heurtent à la volonté politique du gouvernement d’Hô Chi Minh.

Le 19 décembre 1946, le Viet-Minh attaque par surprise Hanoï et c’est le début d’une guerre qui va durer huit ans.

Le général Leclerc, revenu en mission le 28 décembre, prend conscience de la gravité de la situation. Il écrit dans son rapport que si l’on ne veut pas connaître une situation comme celle de la guerre d’indépendance espagnole sous Napoléon Ier ou de l’expédition du Mexique sous Napoléon III, il faut résoudre le problème politiquement et non militairement.

L’amiral d’Argenlieu est maintenu à son poste sous les gouvernements de Félix Gouin, Georges Bidault et Léon Blum. Mais son action est controversée et le gouvernement de Paul Ramadier le remplace le 5 mars 1947 par Émile Bollaert, également Compagnon de la Libération. C’est lui qui célèbre le mariage du fils du général de Gaulle, Philippe de Gaulle, avec Henriette de Montalembert, en 1947.

Dernières années

Des ennuis de santé l’obligent à restreindre ses activités à partir de 1955, et il se démet de ses fonctions de chancelier de l’ordre de la Libération en 1958.

Retiré définitivement au Carmel, il meurt à Brest le 7 septembre 1964. Ses obsèques ont lieu en l’église Saint-Lucien d’Avrechy (Oise), où il est inhumé dans le croisillon sud.

Il est évoqué dans le 100e des 480 souvenirs cités par Georges Perec, dans son texte Je me souviens.


sources wikipedia

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