jeudi 30 avril 2015, par
Type : char d’infanterie.
Equipage : 4 hommes.
Armement : un canon de 2 livres ; une mitrailleuse Vickers .303 (Mark I) ; un canon de 2 livres, une BESA de 7,92 mm (Mark II) ; un obusier de 3 pouces, une BESA de 7,92 mm (Mark II CS).
Blindage :
maximum 78 mm ;
minimum 14 mm.
longueur : 5,61 m ;
largeur : 2,59 m ;
hauteur : 2,51 m.
Poids : 26,9 t
Puissance massique : 7,17 ch/t (Mark III).
Moteurs : 2 AEC 6 cyl. en ligne diesel, développant au total 174 ch (Mark I et II) ; 2 Leyland 6 cyl. en ligne diesel, développant au total 190 ch (Mark III).
vitesse sur route : 24 km/h ;
vitesse en tout-terrain : 12,8 km/h ;
autonomie : 256 km ;
obstacle vertical : 0,61 m ;
coupure franche : 2,13 m ;
gué : 0,91 m.
Temps de service : dans l’armée britannique de 1 939 à 1945. Egalement employé par l’Australie et l’URSS.
Alors que le Matilda I en était encore au stade du prototype, le War Office pesait déjà l’opportunité de lui offrir un complément de blindage et de puissance de feu pour satisfaire à une spécification de l’état-major général amendant un texte antérieur et disant, si l’on allait au fond des choses, qu’« un char appuyant de l’infanterie progressant à pied ne pouvait survivre sans avoir les moyens de résister au feu des canons antichars mais devait aussi porter un armement d’assez fort calibre pour affronter l’infanterie, l’artillerie et les chars de l’ennemi ».
Jusqu’alors, on avait considéré que les mitrailleuses suffisaient amplement mais la nouvelle spécification demandait une véritable artillerie et une tourelle assez vaste pour la loger. Tout d’abord, on pensa que le Matilda l (A11) pourrait recevoir une tourelle biplace et une pièce de 2 livres mais il apparut bientôt que l’étroitesse de la coque ne laissait aucun espoir et que, de toute manière, cette solution imposerait la mise au point d’un nouveau moteur car elle donnerait le coup de grâce au Ford, déjà surmené, du Matilda I. Le poids du char demandé ne devait pas dépasser 14 t et il était absolument impossible que le A11réponde à cet impératif en subissant les modifications prévues ; il fallait donc un nouveau dessin.
Le projet confié au Service des recherches de l’Arsenal de Woolwich, se fondait dans une large mesure sur le prototype A7 de 1932. Il en reprenait la suspension, dûment renforcée, de même que le groupe propulseur fait de deux diesels commerciaux jumelés. Pour obtenir un blindage de l’épaisseur spécifiée, l’emploi d’une tourelle et d’un capot en acier coulé aurait été la meilleure solution mais, en ce milieu des années 1930, l’industrie britannique n’avait que des moyens très limités pour le coulage des pièces de grandes dimensions, ce qui limitait sévèrement le nombre de firmes pouvant honorer un contrat gouvernemental pour ces travaux.
En conséquence, les chars britanniques gardèrent leurs coques et tourelles en assemblage riveté ou soudé longtemps après que les autres pays furent passés au coulage. Cependant, le Matilda 11 finit par trouver son maître d’oeuvre, la fonderie Vulcan de Warrington, qui obtint le contrat en novembre 1936 et acheva une maquette de bois en avril 1937.
Une année encore allait s’écouler avant la réalisation définitive du prototype (en acier doux), le retard étant dû à des difficultés dans la livraison des boîtes de vitesses Wilson. Ce modèle fut soumis aux essais pendant l’hiver 1938 mais une commande initiale de 65 chars avait été passée dès avant l’apparition du modèle pilote et suivie peu après d’une autre portant sur 100 exemplaires. Les essais furent couronnés de succès, les seules modifications jugées nécessaires portant sur des pièces mineures de la suspension et du système de refroidissement.
En 1938, le réarmement du pays démarra pour de bon. La pénurie de chars était dramatique ; d’autres commandes furent donc passées et Vulcan ne pouvait suffire à la tâche. Le War Office fit appel à d’autres firmes telles que Fowler, Ruston and Hornsby, LMS Railway Works, Harland and Wolff et North British Locomotive Works. Vulcan restait l’adjudicataire principal et le premier fournisseur des pièces coulées. Produire en masse le Matilda n’était pas une mince affaire car les pièces coulées, précisément et certains autres éléments, posaient de gros problèmes. Dès lors, on comprend mal pourquoi les jupes blindées étaient coulées d’une seule pièce, puisqu’il s’agissait là d’un autre coulage important Par contre, la production fut immédiatement facilitée lorsqu’on fit passer de six à cinq le nombre des déversoirs de boue latéraux.
En septembre 1939, deux Matilda seulement étaient en service mais, au printemps 1940, un bataillon au moins en était équipé ; le char se comporta très bien pendant. la retraite sur Dunkerque et les combats dans le périmètre du port. Au même moment, plusieurs unités blindées d’Egypte avaient reçu l’engin et l’alignèrent dans les premières campagnes contre les Italiens.
Après Dunkerque, le Matilda I fut purement et simplement abandonné ; le Matilda II perdit son numéro de désignation dans le langage quotidien de la troupe et devint « le » Matilda jusqu’à la fin de la guerre. Dans les campagnes de Libye, en 1940 et 1941, il resta virtuellement invulnérable à tout ce que les Italiens pouvaient lui opposer en fait de blindés et de canons antichars.
Cet avantage dura jusque vers le milieu de l’année 1941 lorsque les premières unités de l’Afrika Korps surgirent sur le front avec leur canon antichar Flak de 88 mm. Cette pièce pouvait mettre un Matilda au tapis à des portées où le 2-livres de la victime était bien incapable de rendre les coups ; le Matilda disparut donc progressivement du champ de bataille. Il fut impossible de lui adapter un 6-livres.
car la cuve de tourelle était trop petite pour loger un plus gros canon et le dernier engagement où le Matilda joua son rôle originel fut la première bataille d’El Alamein, en juillet 1942.
Le véhicule s’organisait suivant la tradition britannique, en trois compartiments, le poste de conduite se situant juste derrière la plaque frontale, au centre. La mitrailleuse de coque brillait par son absence, ce qui était rare pour l’époque mais raisonnable car cette arme était rarement efficace en opération. La lourde tourelle coulée était peu spacieuse, d’une habitabilité insuffisante pour les trois autres membres de l’équipage.
Dans la version CS montant un obusier de 3 pouces, l’espace était encore plus parcimonieusement distribué. Le chef de char disposait d’une coupole circulaire mais ne lui offrant qu’un champ optique limité, ce qui constituait le plus gros handicap du véhicule bien que ce défaut se retrouvât sur beaucoup d’autres engins de cette époque. La tourelle était l’une des premiéres à utiliser la commande hydraulique, mise au point par la société Frazer Nash qui l’avait également adaptée aux tourelles des bombardiers.
L’emport en munitions était de 67 coups de 2-livres et 4 000 coups de .303. Les deux diesels couplés entraînaient la boîte Wilson à trains épicycloidaux et le barbotin. La suspension, dérivée de l’A7, était appelée soit du type « en ciseaux » soit « à la japonaise ».
Le Vickers Medium C fut le premier à utiliser ce type de suspension, dont s’inspirèrent aussi les chars français au cours des années 1920 et 1930. Le train consistait en des bogies reliés l’un à l’autre et agissant contre des ressorts à boudins horizontaux. Chaque bogie comprenait quatre rouleaux distribués par paires de sorte qu’a chaque point de suspension on comptait quatre paires de rouleaux, deux connecteurs et deux ressorts ; l’ensemble était maintenu par un seul support vertical fixé à la coque.
Chaque côté comprenait deux de ces unités complètes, une unité à quatre rouleaux et une grande roue de route à l’avant Cette configuration au premier abord un rien compliquée, se montrait efficace bien qu’elle limitât inévitablement la vitesse maximale.
Le Matilda Mark III et les versions postérieures étaient équipés de diesels Leyland qui donnaient un peu plus de puissance que les AEC et furent fabriqués en plus grand nombre. Le Mark V était doté d’un servo pneumatique au sommet de la boîte pour faciliter les changements de vitesse mais, ces modifications mineures mises à part l’engin resta toujours très fidèle à son dessin originel. Avant la première bataille d’El Alamein, le Matilda s’était gagné le surnom flatteur de « Roi du champ de bataille », du moins chez certaines personnes.
Après El Alamein, il devint manifeste que ce véhicule n’était plus efficace et il dut céder la place aux Grant et aux Sherman, toujours plus nombreux. Dans ces circonstances, que faire des Matilda dont la plupart étaient encore en bon ordre de marche ?
Devant cet épais blindage, la tentation était grande d’affecter ce char à des missions spéciales ; il fut donc le premier blindé britannique équipé de fléaux pour le déminage et certaines de ces conversions furent employées à El Alamein. Outre les fléaux, le char fut doté de tout un éventail d’autres mécanismes assurant entre autres choses, le déminage par rouleaux, le transport de lourdes charges de démolition, la pose de ponts, le travail de terrassement par lames de bulldozer, le franchissement d’excavations diverses, l’attaque par lance-flammes ; enfin, la version CDL (Canal Defence Lights) assurait l’éclairage du champ de bataille pendant la nuit. On fit même une expérience de véhicule téléguidé.
Le Matilda fut livré à l’armée australienne qui le lança dans la campagne du Pacifique et le maintint en service pour l’entraînement jusqu’en 1953. Les Australiens accordèrent une attention toute particulière aux variantes lance-flammes, précieuses dans la jungle contre les positions de l’infanterie japonaise ; une version bulldozer servit aussi beaucoup sur ce théâtre d’opérations, surtout pour améliorer les pistes et permettre ainsi aux véhicules à roues de suivre les chars.
Quelques Mafilda furent envoyés en Union soviétique à titre d’échantillons pour l’aide britannique mais, comme pour le Churchill un peu plus tard, les experts russes refusèrent poliment le 2-livres, à leurs yeux si petit qu’il en devenait presque uniquement décoratif.. Malgré la traditionnelle discrétion des Russes à propos du matériel qu’on leur fournissait certains rapports parvinrent en Grande-Bretagne, anonçant que le train de roulement avait une fâcheuse tendance à se bloquer dans la neige ; en 1945, la coque du Matilda était en cours de remplacement par celles du Grant et du Sherman, même dans ses rôles spécialisés. Les fournitures de pièces détachées et d’éléments divers s’organisaient en fonction des chars les plus répandus, soit les véhicules américains, les croiseurs lourds et le Churchill.
Après quatre ou cinq ans de combats continus, les Matilda donnaient des signes évidents d’usure et il s’avéra trop peu rentable de les remettre en fabrication. Quelques-uns étaient toujours en service à la fin du conflit mais dans des rôles secondaires, Il n’en reste pas moins que le Matilda peut prétendre être le seul char britannique ayant servi du premier au dernier jour de la seconde guerre mondiale ; très rares sont les engins qui peuvent approcher ce record, quelle que soit leur nationalité.
l’encyclopedie des blindés ed. Elsevier Séquoia 1978
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