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Sarmates

, par

La phase suivante de l’hégémonie irano-scythique est liée, dans la partie occi­dentale des steppes, aux Sarmates.

On a vu qu’Hérodote mentionnait, aux marges orientales de la Scythie d’Eu­rope, les Sauromates. Le nom est iranien et signifie les « fourrures (*coma-) noires (*sau-) », avec la désinence du nominatif pluriel -ta typique des parlers scythiques. Les Mélanchlaines également cités par Hérodote sont sans doute le même peuple, sous un nom traduit approximativement en grec. L’expression archéologique des Sauromates est la culture développée du Vile au IVe siècle avant notre Ere dans les steppes russes du Don à l’Oural, et dans l’ouest du Kazakhstan. Cette culture pastorale et guerrière, socialement diffé­renciée, est conforme au modèle scythique classique. Elle fait une place d’hon­neur aux femmes jusque dans les activités guerrières, ce qui corrobore les dires d’Hérodote et fonde les traditions légendaires sur les Amazones, connues tant chez les Grecs que dans la poésie épique ossète. 20 % des tombes féminines des VIe-IVe siècles av. J.-C. contiennent des armes et des harnachements de che­vaux
.

L’influence des Sauromates s’étend aux Ve-IVe siècles av. J.-C. à une partie du Caucase septentrional, jusqu’à la Kouma et au Térek (kourganes d’Atchi­koulak et de Bajigan). Au IVe siècle avant notre Ere, les Sauromates commencent à franchir le Don et le Donets septentrional et à se heurter aux Scythes d’Ukraine. Entre le IVe et le IIe siècle, certains groupes s’avancent jusqu’au Dniepr. A cette époque, les écrivains grecs parlent indifféremment de Sauromates, Sarmates (Eudoxe, Stra­bon), puis Sarmates (Polybe). Sur le plan archéologique, cette expansion et ces variations terminologiques correspondent à la diffusion de la culture de Pro­khorovka, apparue au IVe siècle dans l’Oural et rapidement propagée vers l’ouest. Cette culture est liée à celle de la phase sauromate antérieure, mais com­porte apparemment d’autres apports (centre-asiatiques ?).

On peut donc penser que les Sarmates historiques se sont constitués à partir des Sauromates, dont ils ont conservé le nom (en dépit de certaines difficultés phonétiques, il s’agit certainement de deux variantes d’une même appellation), mais en assimilant d’autres groupes iraniens plut orientaux. De toute façon, les Sarmates n’ont jamais formé un ensemble unique, et ils apparaissent d’emblée divisés en tribus ou confédérations tribales.

De tels groupements sont évoqués sur le décret de la ville d’Olbia en faveur de Protogène, comme les Eatot (*khchaya- « royaux ») ou EavSapatat (*sau­dâra-ta « porteurs de noir », ce qui rappelle l’étymologie du nom des Sarmates eux-mêmes).

La poussée vers l’ouest des Sarmates s’accentue à partir du Ile siècle av. J.-C. Elle coïncide avec la diffusion de ce que les archéologues nomment « culture sarmate moyenne », qui succède à celle de Prokhorovka sur un territoire nota­blement élargi. Cette expansion est contemporaine de celle des Parthes (aux fortes affinités « scythiques ») en Perse, et des Saces et Tokhariens plus loin à l’est.

Les échos de la conquête des steppes ukrainiennes par les Sarmates se ren­contrent chez Diodore de Sicile, qui écrit au ler siècle av. J.-C. mais rapporte des événements antérieurs. Pour Diodore, les Sarmates « dévastèrent une partie consi­ dérable de la Scythie et, exterminant les vaincus jusqu’au dernier, transformèrent en dé­sert la plus grande partie du pays ». Comme à propos des Cimmériens et des Scythes cinq siècles auparavant, on peut se demander si ce tableau est réaliste. Des Scythes survivront en tout cas jusqu’aux premiers siècles de notre Ere, vers l’embouchure du Danube (« Petite Scythie ») et surtout en Crimée. La culture scythe tardive de Crimée manifeste d’évidentes influences sarmates.

Les modalités de cette conquête sont inconnues ; nous ignorons tant les rap­ports de force entre Sarmates et Scythes que la situation politique de ces der­niers avant leur défaite. On a invoqué un affaiblissement progressif du ou des royaumes scythes après les guerres contre les Macédoniens et la mort du grand roi Athéas (339 av. J.-C.), ou la supériorité militaire que les Sarmates auraient tiré de leur cavalerie lourde cuirassée, si tant est qu’elle ait déjà existé en nombre à cette époque.

Quoi qu’il en soit, les Sarmates dominent dès le début du Ier siècle avant notre Ere toute la steppe ukraino-russe, du Danube à l’Oural, et une partie de la Ciscaucasie. Dans cette dernière région, ils poursuivent le processus d’iranisases itinéraires déterminés. Le rayon des déplacements saisonniers peut at­teindre 100 à 400 km, suivant des estimations faites dans la zone Volga-Oural. La transgression de limites souvent mal définies, les vols de bétail, doivent être des causes permanentes de guerre. Avec les Sarmates apparaissent d’ailleurs dans les steppes les signes héraldiques familiaux que les ethno­graphes désignent du nom turco-mongol de tamga, et qui servent à marquer le bétail et les objets domestiques, à signaler des points de passage, etc. La diversité des mobiliers funéraires montre que la société est nettement hié­rarchisée. Les grandes confédérations tribales sont dirigées par des « rois » qui font surtout figure de chefs de guerre. Il existe certainement, au-dessus de la masse des hommes libres (l’esclavage ne semble pas représenter une réalité im­portante), une élite de « nobles ». C’est le schéma que l’on reconstitue déjà chez les Scythes, et c’est celui qui s’est perpétué jusqu’à l’époque moderne au Cau­case
.
Les femmes peuvent occuper de hautes situations (une reine sarmate, Amagê, est mentionnée au IIe siècle). Les sépultures féminines ne contiennent plus d’armes comme aux époques précédentes, mais le mobilier funéraire com­prend souvent des objets mi-utilitaires, mi-rituels (miroirs métalliques, autels­cassolettes portatifs) qui peuvent suggérer le service de certains cultes liés au feu domestique.

Dans le domaine militaire, sans innover absolument, les Sarmates dévelop­pent des tactiques et des types d’armes peu employés par les Scythes. Ainsi, « les chefs et tous les nobles », comme les appelle Tacite, forment une cavalerie lourde de lanciers cuirassés (cataphractaires), qui agit par le choc au moment dé­cisif d’une bataille, lorsque le terrain a été préparé par le harcèlement des ar­chers montés (fournis par la masse des hommes libres non-nobles). C’est sans doute pour ces cavaliers lourds que se répand l’épée longue de taille à pom­meau discoïdal, concurremment à l’habituelle épée courte à pommeau annu­laire
.
La religion n’est connue qu’à travers les sépultures et les traces de rites funé­raires qu’elles peuvent contenir. Ce sont généralement des tertres (kourganes) recouvrant des fosses individuelles ou collectives de structure variable. On a notamment essayé d’attribuer aux Roxolans un type particulier de fosse où le corps est placé en diagonale, mais le fait est contesté. Les défunts sont toujours accompagnés d’un mobilier proportionnel à leur statut. L’art sarmate repose sur les mêmes traditions animalières que celui des Scythes, mais il n’a pas connu la même hellénisation. Il nourrit une prédilection pour les incrustations de matériaux colorés (pierres semi-précieuses, verre), que l’on rencontre aussi dans d’autres parties du monde iranien antique, comme en Bactriane.


sources : "Les Alains, cavaliers des steppes et seigneurs du caucase" Vladimir Kouznetsov et Iaroslav Lebedynsky ed Errance 1997

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