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Le debut de la bataille

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La bataille de Dien Bien Phu commence donc dans des conditions défavorables pour les Français ; les officiers le savent ou en ont le pressentiment ; il semble que Navarre et Cogny aient des doutes sur son issue. Mais les dés sont jetés.
Le soir du 12 mars 1954, Giap donne ses derniers ordres avant l’attaque. Il connaît l’enjeu de la bataille et sait ce qu’elle coûtera. « Nous aurons à subir des pertes au cours de l’action. La victoire s’acquiert au prix du sang, comme toutes les conquêtes révolutionnaires, et par des sacrifices. » Du côté français, on est au courant de l’imminence de l’attaque. Le colonel de Castries et ses hommes attendent ce moment depuis plusieurs semaines.
Le jour J, les assaillants ont une supériorité de 8 contre 1. Les Français ne peuvent mettre en ligne que 6 500 hommes contre les 50 000 combattants des divisions d’élite vietminh (les 308e, 312e, 316e et 304e), de la 351’ division de génie et d’artillerie et du 148e régiment du territoire. Les Français disposent de cinq bataillons de la Légion étrangère, mais huit autres sont formés de tirailleurs algériens et marocains, de Thaïs, de Vietnamiens, de supplétifs et de police mobile.
Le 13 mars, des mouvements viets sont signalés autour des points d’appui « Béatrice » et « Gabrielle », tandis que deux régiments de la 312’ division partent de leur base de départ, à moins de 1 600 mètres des défenses françaises. Deux C47 et un chasseur-bombardier sont détruits par l’artillerie ennemie sur la piste d’atterrissage.
A 17 h 15, les premiers obus de 105 tombent sur « Béatrice », tenue par le 3’ bataillon de la 13’ demi-brigade de Légion étrangère. Deux canons de 105 en position sont détruits et le colonel Gaucher, qui commande le point d’appui est tué.
L’infanterie vietminh attaque « Béatrice » à la nuit tombante, après que ses sapeurs aient pratiqué des brèches dans les barbelés. Sans tenir compte de ses pertes, l’ennemi avance, envahissant abris et tranchées. Pied à pied, combattant à la grenade, il s’infiltre dans les boyaux. A 21 h, un seul point de résistance tient encore. Un peu après minuit, un silence pesant tombe sur « Béatrice ». Sa garnison de légionnaires a perdu 75 % de son effectif et moins de 200 hommes pourront rejoindre le gros des troupes françaises.
Dans le camp retranché, les assiégés sont atterrés. Un point d’appui défendu par la Légion enlevé en six heures ! Des milliers d’hommes regardent vers la position perdue et essaient de comprendre. Le colonel de Castries, qui a passé toute la nuit au téléphone et a vécu l’agonie de « Béatrice », alerte le quartier général à Hanoi. On lui promet des renforts et un appui aérien.
Le quart des munitions de 105 a été consommé en une nuit ; de plus, le terrain d’aviation, vital pour les assiégés, est inutilisable ; l’artillerie ennemie a contraint les chasseurs-bombardiers encore intacts à décoller : ils ont gagné le Laos.
Le lendemain, 14 mars, le 5’ bataillon de parachutistes vietnamiens est largué en renfort ; de Castries envisage une contre-attaque sur « Béatrice ». Mais un ciel bas et une violente tempête interdisent tout appui aérien.
A 18 h, les batteries ennemies commencent à bombarder « Gabrielle », prochain objectif de Giap. Le point d’appui est tenu par un bataillon de tirailleurs algériens et dispose de huit mortiers de 120 mm de la Légion étrangère. Le Vietminh engage dans l’attaque les 88’ et 165’ régiments de sa 308’ division. Huit bataillons contre un.
Bénéficiant de leur défense en profondeur, les Algériens résistent au premier assaut. Mais à l’aube du 15 mars un seul fortin tient encore.
La contre-attaque française vers « Gabrielle » est menée par deux compagnies de la Légion et un bataillon de parachutistes vietnamiens, appuyés par six chars M24. Elle progresse jusqu’à moins de 1 500 m de la position et permet à 150 de ses occupants de rejoindre les lignes françaises avant que son élan ne soit brisé. Un deuxième point d’appui vient donc de tomber.
Moins de deux jours après le déclenchement de l’offensive de Giap, le commandement français ne se fait plus d’illusion. Dien Bien Phu est une souricière. A plus de 1 200 km de là, à Saigon, le général Navarre dirige les combats de son bureau. Il est vrai que c’est le général Cogny, installé à Hanoi, qui a la responsabilité directe de la bataille. Les deux généraux sont au courant des revers qui viennent d’être essuyés ; ils en mesurent les conséquences et, tout d’abord, celles qu’ils ne manqueront pas d’avoir sur leur carrière.
Navarre se décide à venir à Hanoi, où l’attend un message signé de Cogny. Ce message dit en substance : en raison des pertes subies par nos troupes, il y a lieu d’envisager la possibilité d’une défaite à Dien Bien Phu. Tout en reconnaissant la défaite inévitable, Cogny espère que la responsabilité ne lui en incombera pas.
Par la suite, les relations entre-ces deux hommes conduisant la même bataille se limiteront à un échange de notes écrites. Ils s’entendent cependant sur un point : trouver des boucs émissaires : les officiers du génie qui ont conçu les fortifications, les interprétateurs-photo, les équipages des avions de transport et d’attaque au sol et, naturellement, le gouvernement lui-même.
En 1953-54, l’armée du Vietminh est une force équilibrée, organisée en divisions, régiments, bataillons, compagnies, tous dotés d’armes modernes ; les hommes sont bien encadrés et disciplinés. De plus, ils combattent pour leur propre pays et pour une cause en laquelle ils croient passionnément. Le général Giap est prêt à frapper un grand coup.
A partir du 15 mars, le moral de la garnison de Dien Bien Phu est au plus bas. Pendant la nuit, le colonel Piroth, n’acceptant pas l’impuissance de son artillerie, se suicide. Au P.C., quelques officiers ont craqué. De Castries, surpris et submergé par es événements, hésite. Il ne lui manque ni courage ni panache, mais plutôt les qualités nécessaires pour conduire une bataille. Plus tard, on lui reprochera sa passivité. Il faut se souvenir qu’il avait reçu l’ordre de défendre Dien Bien Phu après que plusieurs généraux et colonels eussent « décliné cet honneur ».
Un soldat d’une tout autre trempe est le colonel Langlais, commandant les troupes aéroportées. Le 24 mars, de Castries lui remet le commandement effectif du camp retranché, à l’exception d’« Isabelle », placée sous les ordres du colonel Lalande. Ce transfert d’autorité n’a rien d’officiel, mais est la reconnaissance tacite de la situation dans laquelle se trouve la garnison. Langlais est secondé par Bigeard, revenu une semaine plus tôt dans la cuvette avec son bataillon. Bigeard et ses hommes seront les derniers à assurer la défense du camp.

Profitant de plusieurs jours d’accalmie, tous les hommes capables de manier la pelle et la pioche s’emploient à consolider les tranchées et les abris.
Le 16 mars, sur « Anne-Marie », les soldats du 3’ bataillon thaï ont le pressentiment qu’ils vont être attaqués. Ils décident d’abandonner le champ de bataille et regagnent leurs villages. Plusieurs centaines de Nord-Africains et de Vietnamiens désertent également pour aller s’installer dans les tranchées des rives du Nam Yum.
Giap et le comité militaire du front ont tiré les leçons de la première phase de l’offensive. Leurs pertes ont été très lourdes mais ils décident de poursuivre leur tactique d’étranglement. En dix jours, leurs troupes de première ligne creuseront plus de 10 kilomètres de tranchées et de chemins d’accès. Elles perceront une galerie d’une cinquantaine de mètres pour placer une énorme charge d’explosif sous la position baptisée « Eliane ».
Dans la nuit du 30 mars, après une violente préparation d’artillerie, les 312’ et 316’ divisions viets déclenchent leur attaque sur les cinq collines où sont établies « Dominique » et « Eliane ». Pendant quatre jours, le combat fait rage. On s’affronte au corps à corps pour des positions qui seront perdues, reprises puis reperdues. En une seule journée, les défenseurs tirent 13 000 coups de 105. Les pertes subies par l’assaillant sont effroyables ; il est contraint de s’arrêter devant son objectif ; il a échoué ; mais il a progressé et il va continuer de grignoter la zone de défense.
La situation devient critique le 2 avril, quand les unités de la 308’ division sont lancées contre « Huguette ». Bigeard rassemble alors toutes les forces disponibles pour contre-attaquer ; les Viets s’arrêtent à nouveau, laissant 800 morts dans les barbelés. Le moral des assiégés se raffermit. Il est encore meilleur lorsque Bigeard reprend sur « Eliane » un des points de résistance perdus au terme d’un combat acharné. Giap a usé quatre bataillons, en vain.
En fait, dans l’ensemble, la situation des Français ne s’est pas améliorée. Plusieurs milliers d’hommes sont encore isolés, pris au piège. De leur côté, les divisions vietminh sont épuisées par leur effort et Giap est contraint de lancer une campagne pour « mobiliser les forces morales et rectifier les tendances de l’aile droite ».


sources : Connaissance de l’histoire ed hachette 1982 article de Charles Meyer

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