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L’étranglement du commerce

, par

Tandis que la bataille du ciel faisait rage entre la Royal Air Force et les bombardiers et avions de chasse allemands, déterminés à pilonner l’Angleterre jusqu’à sa soumission, une autre bataille se déroulait dans les eaux territoriales anglaises. Le plan que Hitler avait adopté pour vaincre la Grande-Bretagne ne reposait pas tant sur une invasion au-delà de la Manche (ce qui, en fait, aurait été l’ultime solution si tout le reste avait échoué), mais dans l’étranglement du commerce britannique.
A la veille de l’avance des armées allemandes, des bateaux-torpilles à moteur, connus sous le nom de E-boote, faisaient leur apparition.
Ces torpilleurs poussèrent leurs bases jusqu’à Cherbourg au cours de la seconde quinzaine de juin 1940. Leurs cibles étaient les convois côtiers. Ils avaient aussi la mission de poser des champs de mines offensives devant les ports anglais. Des attaques aériennes d’envergure contre les convois et contre les ports faisaient aussi un grand nombre de victimes parmi les effectifs anglais. Ces attaques ne visant qu’à toucher les bateaux sans les combattre, elles paralysèrent un grand nombre de bâtiments britanniques. Plusieurs mois de rudes et incessantes escarmouches devaient s’écouler avant que l’ennemi ne fut tenu en échec et que le commerce côtier ne put reprendre son cours dans une sécurité toute relative.

Il fallait aussi protéger l’Angleterre contre une possible invasion par mer. De l’autre côté de la Manche tout le monde s’attendait à une telle éventualité au cours de l’été et de l’automne 1940. En fait, cet événement n’aurait pas constitué une grande nouveauté. La Royal Navy, une fois de plus, se replia derrière ses méthodes de défense traditionnelles, éprouvées depuis des siècles d’expérience. Ces méthodes- étaient basées sur la surveillance vigilante de l’envahisseur par des vaisseaux de flottilles — autrefois, des sloops, des cotres et des canonnières ; en 1940, desdestroyers, des torpilleurs et des canonnières. A l’arrière de ceux-ci, dans les ports de toutes les côtes, à l’est comme à l’ouest, veillaient les bateaux de plus grande puissance, soutien immédiat de la défense, autrefois des frégates, aujourd’hui des Croiseurs. Et derrière ceux-là, toujours, la sauvegarde décisive — l’immense force de la flotte de combat qui devait appareiller vers le sud pour entrer en action aussitôt que les forces d’invasion se seraient mises en marche.

Au-delà des eaux de la Manche, se dressait, en 1940, l’armée de Hitler, comme s’étaient dressées auparavant les armées de Napoléon, celles de Louis XIV ou de Philippe II d’Espagne. Contre tous ces hommes et leurs rêves de conquêtes s’était dressée la marine anglaise. Contre Hitler et ses propres fantasmes, la marine anglaise se dresserait encore. Mais les jours et les semaines passaient. Tandis que les moyens de transports retirés des cours d’eau de l’intérieur (ce qui paralysait beaucoup le commerce local) étaient toujours tranquillement amarrés dans les ports de la Manche, les lords de l’Amirauté britannique auraient pu faire écho aux paroles du comte de Saint-Vincent qui disait, cent cinquante ans plus tôt, que « s’agissant d’un problème militaire, il fallait hésiter avant d’exprimer la moindre opinion concernant une invasion en tant que telle ». Tout ce qu’ils savaient alors était que l’invasion « ne pouvait pas venir par la mer ».
De tous les combats importants auxquels la Royal Navy s’était heurtée jusque là — la campagne de Norvège et l’évacuation de Dunkerque, entre autres , se dégageait une leçon évidente : les bateaux ne pouvaient rien dans les eaux dominées par les forces aériennes ennemies. L’arme la plus efficace pour combattre les forces de l’Axe — l’Italie s’était jointe au conflit lors’ de la chute de la France — demeurait le blocus. Pour maintenir l’efficacité de cette arme, il fallait continuer à tenir le cercle de puissance maritime tracé autour de l’Europe. Ce cercle devait pourtant échapper aux avions qui utilisaient les terrains d’aviation récemment acquis en Norvège, au Danemark, en Hollande, en Belgique et en France. La Grande-Bretagne, maintenant débordée au sud et à l’est, devait surveiller attentivement, le nord et l’ouest si elle ne voulait pas être vaincue. Aussi étendit-elle sa puissance maritime vers l’Islande, ainsi que vers la côte du Groenland, à travers le détroit de Danemark. A l’ouest, elle fit la jonction avec l’Atlantique à partir de l’Irlande du Nord, puis déploya un grand arc vers le sud, jusqu’à Gibraltar et Freetown, en Afrique occidentale. Pour boucler le cercle, la Flotte de Méditerranée tenait le bassin oriental depuis Malte jusqu’aux côtes de Grèce.
Les forces de l’Axe étaient donc enfermées dans ce cercle ténu. Elles devaient franchir cette barrière si elles voulaient atteindre les matières premières détenues par le reste du monde. Aucune barrière pourtant n’aurait été assez forte pour contenir les bateaux de guerre allemands. Rien non plus, ne pouvait interdire aux U-boote la porte des océans. Mais malgré tout, les Anglais parvinrent à stranguler la quasi-totalité de ce trafic maritime, sans lequel les deux dictateurs de l’Axe ne pouvaient gagner leur guerre.
Il leur fallait à tout prix tenir cette barrière, qui, si une victoire décisive devait être emportée par l’Angleterre, pouvait servir un double but. Il ne s’agissait pas seulement d’étrangler le commerce maritime de l’Allemagne et de l’Italie ; il fallait aussi, tout en isolant les deux puissances, sauvegarder la lente élaboration des ressources et des forces de la Grande-Bretagne, jusqu’au jour où sa stratégie serait à même de devenir non seulement défensive mais encore offensive.Pour cela, il fallait acheminer vers l’Angleterre tout le pétrole, l’acier, les tanks, les canons, les avions et les munitions sans lesquels le seul avenir qui subsistait était la défaite. Il fallait aussi faire venir des dominions et des colonies, et plus tard des États-Unis, les hommes qui devaient un jour se joindre aux armées destinées à porter la guerre sur le continent européen. Il fallait enfin pouvoir envoyer les troupes, les armes et les munitions nécessaires aux autres théâtres des opérations, ceux du Moyen-Orient et, plus tard, ceux d’Extrême-Orient.
Cette besogne, en ces mois de l’été 1940, parut insurmontable, d’autant plus qu’on avait essuyé tant de pertes au cours des opérations de Norvège et de Dunkerque, et que, d’autre part, beaucoup de bâtiments étaient toujours immobilisés dans la Manche pour prévenir l’invasion de l’Angleterre. Là où, en 1939, il avait été possible de procurer à chaque convoi une moyenne de deux escorteurs, en 1940, cette moyenne venait de diminuer d’un huitième par convoi. En outre, les sous-marins qui commençaient à utiliser les bases françaises et norvégiennes, pouvaient maintenant écourter de 1 000 milles, ou même plus, le trajet qu’ils avaient à effectuer pour rejoindre leurs zones de patrouille, ce qui leur permettait d’opérer considérablement plus loin dans l’Atlantique, souvent bien au-delà des zones où les convois pouvaient être escortés.
Deux faibles lueurs d’espoir pourtant éclairaient cette sombre situation. La première fut occasionnée par l’occupation de l’Islande et des îles Féroé par les troupes britanniques. Ces îles étaient dépendantes du Danemark, mais lorsque ce pays fut envahi par l’Allemagne, en avril 1940, l’Angleterre s’en était rapidement emparée afin que Hitler ne puisse les revendiquer.

L’Islande était particulièrement bien située pour servir de base aux convois sur les routes de l’Atlantique. Elle devait permettre aux convois venant, soit d’Angleterre, soit des ports canadiens, d’être escortés beaucoup plus loin. Il n’était pas question de l’utiliser dans l’immédiat car son aménagement nécessitait un certain temps, mais dans l’avenir, incontestablement, elle devait offrir des avantages conséquents.
L’autre lueur fut apportée par des négociations entreprises par Churchill et Roosevelt. Les États-Unis s’engageaient à céder à l’Angleterre une flotte de 50 vieux destroyers en échange de certaines bases à Terre-Neuve et aux Antilles. Ces destroyers, de type périmé, devaient être rapidement révisés et rééquipés dans des chantiers américains : on devait ensuite les mettre à la disposition des marines anglaise et canadienne, où ils serviraient à augmenter le nombre des escorteurs, en attendant que les constructions nouvelles puissent rejoindre la flotte.


sources Connaissance de l’histoire n°1 Hachette mars 1978

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